Cette synthèse des preuves a été compilée par les membres du secrétariat du GTIC avec la contribution d’experts affiliés au GTIC et ne reflète pas nécessairement l’opinion de tous les membres du GTIC

Par Varun Anipindi

À cause de la pandémie de COVID-19, il est devenu urgent de fabriquer et de distribuer des vaccins rapidement partout dans le monde. À l’heure actuelle, trois produits (deux à partir de la plateforme d’ARNm de Pfizer-BioNTech et de Moderna, et un à partir de la plateforme du vecteur adénoviral d’AstraZeneca-Oxford) sont utilisés en vertu d’une autorisation d’utilisation d’urgence des programmes de vaccination mondiaux. Ces fabricants recommandent d’administrer deux doses à des moments précis pour en optimiser l’efficacité. Cependant, étant donné l’ampleur de la pandémie et la demande sans précédent de ces vaccins, les pays (y compris le Canada) doivent relever des défis logistiques pour obtenir la quantité de doses nécessaires à la vaccination de la population. On constate également une grande ambiguïté et des inquiétudes sanitaires quant aux conséquences du report de la dose de rappel (deuxième dose) des vaccins. Dans ces circonstances, il est important de comprendre si 1) l’intervalle entre la première dose et la dose de rappel du vaccin peut être prolongé en toute sécurité et 2) les personnes profitent d’une protection efficace dans la période qui suit la première dose, mais précède la dose de rappel.

Deux publications parues dans The Lancet traitent de ces préoccupations.

Le groupe d’essais sur les vaccins d’Oxford a publié une analyse approfondie sur l’influence de la période entre la première dose et la dose de rappel du vaccin ChAdOx1 nCoV-19 d’Oxford-AstraZeneca dans quatre essais aléatoires et contrôlés réalisés au Royaume-Uni, au Brésil et en Afrique du Sud1. Auparavant, ce vaccin a démontré une efficacité combinée de 70,4 % contre l’infection par le SARS-CoV-2 après deux doses administrées à un intervalle de quatre et 12 semaines2. Dans cette nouvelle publication, ils  ont effectué une autre analyse de ces cohortes pour examiner la protection après un intervalle entre les doses inférieur  à  six  semaines  ou  supérieur  à  12  semaines.  Ils  ont  démontré  qu’un  intervalle  de  plus  de   12 semaines pouvait donner de meilleurs résultats cliniques sans compromettre la protection conférée au cours de la période de trois mois entre la première dose et la dose de rappel. La dose de rappel accroissait le taux d’anticorps neutralisants, ce qui peut jouer un rôle important  dans  une  protection  durable. L’efficacité des vaccins chez ceux ayant reçu leurs doses à plus de 12 semaines  d’intervalle s’élevait  à    81,3 %, par rapport à 55,1 % chez ceux qui les avaient reçues à moins de six semaines d’intervalle. Selon les chercheurs, ce résultat confirme les observations de plus grande efficacité et de meilleure réponse immunitaire à l’égard d’autres vaccins contre des agents pathogènes comme l’influenza, le virus Ebola et le paludisme. Fait remarquable, d’après une observation secondaire, une seule dose du vaccin ChAdOx1 nCoV-19  avait  une  efficacité  de  76  %  contre  la  COVID-19  symptomatique,  sans  affaiblissement  notable de l’immunité jusqu’à 12 semaines après la première dose. Bien que cette étude n’ait pas  été conçue pour établir la longévité absolue de la protection après une dose, elle fournit des données  précieuses  pour éclairer les décisions sanitaires.

Lire l’article (en anglais) ici.

L’efficacité d’une dose du vaccin Pfizer-BioNTech (ARNm BNT162b2) ou du vaccin Oxford-AstraZeneca (ChAdOx1 nCoV-19) à prévenir les hospitalisations liées à la COVID-19 a été étudié chez les 5,4 millions habitants de l’Écosse. Près d’1,1 million de personnes ont été vaccinées dans cette étude, et l’effet vaccinal   a augmenté régulièrement entre le 28e et le 34e jour suivant l’administration de la première dose des deux vaccins. Ces deux vaccins ont fait chuter les hospitalisations liées à la COVID-19 avec une grande efficacité (BNT162b2 : 85 %; ChAdOx1 : 94 %). Même si l’étude ne tient pas compte de facteurs confusionnels comme les infections secondaires et les groupes d’âge, elle fournit des données probantes sur les répercussions démographiques de la première dose des deux plateformes.

Lire l’article en préimpression (en anglais) ici.

 

Une deuxième dose de vaccin retardée peut conférer une meilleure protection contre le COVID

Dans l’ensemble, ces deux études fournissent des données convaincantes qui peuvent inciter à étirer les réserves vaccinales limitées pour profiter de plus vastes effets sanitaires. Ces données corroborent les remarques de Moderna, qui a également proposé de laisser tomber la deuxième dose du vaccin à ARNm chez les personnes de 18 à 55 ans pour doubler le nombre total de doses disponibles. Fait essentiel, ces études appuient également la notion selon laquelle un intervalle plus long entre les doses peut favoriser de meilleurs résultats cliniques à long terme. Ces sentiments ont également été repris par le Dr Skowronski et   le Dr De Serres dans une lettre à l’éditeur publiée par le New England Journal of Medicine. Elles peuvent aussi atténuer certaines inquiétudes liées à l’écart prolongé ou au retard avant d’administrer la deuxième dose recommandée. Cependant, il faut tenir compte d’autres facteurs en raison de l’essor des variants du SARS-CoV-2 partout dans le monde. Les taux  plus élevés  d’anticorps neutralisants produits par l’administration de la série complète de deux doses du vaccin peuvent être essentiels pour conférer une protection contre certains variants. On ne sait pas si les bienfaits liés à une meilleure couverture vaccinale peuvent coïncider avec les défis posés par l’émergence des variants. D’autres études s’imposent pour contribuer à déterminer les conséquences globales de modifications aux posologies.

Lisez la lettre au rédacteur en chef ici.